Le colza est la culture la plus performante en matière de stockage de carbone
Le colza a la capacité de restituer de grandes quantités de carbone dans les sols. Avec à la clé, la réponse à un double enjeu : le maintien de la fertilité des sols agricoles et la compensation des émissions de CO2 responsables pour partie du changement climatique. Anne-Sophie Perrin, chargée d’études sols et environnement chez Terres Inovia (1), nous parle de cette qualité particulière du colza.

OleoZE : En quoi piéger du carbone dans les sols agricoles est-il devenu un enjeu ?
Anne-Sophie Perrin de Terres Inovia : Il s’agit d’abord de préserver la fertilité des sols si on veut continuer à produire. Les matières organiques étant à 47 % composées de carbone, les premiers à profiter des augmentations de leurs teneurs dans les sols seront les agriculteurs. Les matières organiques favorisent également la résilience des sols face aux changements climatiques. Mais l’enjeu est aussi sociétal puisque le piégeage du carbone est un puissant levier pour diminuer le CO2 atmosphérique. L’étude menée par l’Inrae (2), en lien avec l’initiative 4 pour 1 000, a démontré que c’est dans les sols de grandes cultures que l'on peut stocker le plus de carbone en France. Ils sont à la fois un capital pour les cultures et un puits pour les gaz à effet de serre.
OleoZE : Quels sont les leviers pour favoriser ce processus ?
Anne-Sophie Perrin : Restituer un maximum de résidus de cultures, ramener du fumier si on veut récolter les pailles, apporter d’autres matières organiques. Il est aussi recommandé de mettre en place des couverts entre deux cultures de rente ou associés aux cultures. Le colza associé concernait 20 % des surfaces en colza en 2020 en France. En termes de restitution de carbone, cette pratique fonctionne bien et présente plusieurs co-bénéfices comme diminuer les quantités d’herbicides, d’insecticides (sous réserve d’un développement suffisant du colza et du couvert), d’azote, limiter l’anoxie, etc. Ces leviers sont expérimentés dans des systèmes de culture innovants au sein des plateformes Syppre (3), un projet inter-instituts dont Terres Inovia est partenaire.
OleoZE : Pourquoi le colza restitue-t-il davantage de carbone que d’autres cultures ?
Anne-Sophie Perrin : Cela tient à la fois à la biomasse de la plante en elle-même, qui est importante, mais aussi à la nature des résidus. Les parties aériennes du colza sont fortement carbonées par rapport à l’azote qu’elles contiennent. La matière organique restituée au sol est bien intégrée au stock de carbone. Un colza d’hiver seul, avec un rendement de 35 quintaux par hectare en limon profond de Picardie permet, selon des observations réalisées grâce à l’outil Simeos-AMG (4) dans le cadre du projet SoléBiom (5), de rapporter plus de 1 600 kg de carbone humifié par hectare, davantage qu’un maïs ou un blé tendre d’hiver avec ses pailles.
La décomposition des résidus de culture du colza agit par ailleurs sur la réduction de la pression fongique dans le sol. Dans la rotation, il a également un effet coupure important et c’est aussi une plante très mellifère. Tout cela confirme l’intérêt agronomique de cette culture, au-delà de son intérêt pour le stockage du carbone dans les sols agricoles.

Rendements de référence :
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Sol argilo calcaire superficiel à 3 % de matières organiques |
Sol de limon moyen profond à 1,6 % de matières organiques |
Colza d’hiver |
30 quintaux/ha |
45 quintaux/ha |
D’après les résultats du projet SOLéBIOM
(2) https://www.inrae.fr/actualites/stocker-4-1000-carbone-sols-potentiel-franc